En tant que spécialiste en anxiété de séparation, cette thématique me préoccupe énormément, mais il s’agit d’un aspect de l’entraînement souvent négligé lors de l'accueil du chiot. Les chiens ne sont pas d'emblée à l’aise avec la solitude, rester seul est quelque chose qui s’apprend. Il ne faut pas oublier qu’ils sont des créatures hautement sociales qui nécessitent un apprentissage pour s'adapter au fait d’être laissés à eux-mêmes. Pour le bon développement du chiot, il doit être constamment entouré de sa mère, de sa fratrie et de ses humains, on ne peut donc pas penser que d’un jour à l’autre, il trouvera agréable de se retrouver complètement seul s’il n’y est pas préparé adéquatement.
Voici les meilleurs conseils pour prévenir les problèmes de séparation et aider votre chiot à se détendre lors de vos absences. Lisez attentivement avant de laisser seul à la maison votre petit protégé afin d’éviter qu’il ne panique, hurle, aboie ou pleure lors de votre départ ou simplement lorsqu'il ne vous voit plus, ou ne peut être en contact direct avec vous.
Ces exercices devraient être une priorité tout comme l’apprentissage de la propreté, mais ne commencez pas le jour de l'adoption. Assurez-vous d'abord que votre chiot soit à l'aise dans son nouvel environnement, sa nouvelle routine et avec sa nouvelle famille. Lorsqu’il sera un chiot confiant, optimiste et téméraire, commencez progressivement le travail de séparation.
Bien que ce travail puisse sembler long et fastidieux, sa valeur est inestimable. Selon une étude britannique, 70% des chiens seraient inconfortables lors de la séparation de leurs humains et produiraient du cortisol, une hormone de stress. Environ 20% des chiens développeront des problèmes d’attachement comme l’anxiété de séparation.
Ces chiffres ne sont pas surprenants compte tenu du caractère social du chien et de son évolution. Le chien est tout de même apparu principalement lorsque des loups sont devenus dépendants des humains afin de simplifier leur quotidien. L’anxiété de séparation est tellement un obstacle énorme au bien-être d’un animal qu’il me semble souhaitable de tout faire pour limiter les chances qu’un chien la développe. Le meilleur moyen que nous connaissons pour prévenir l’anxiété de séparation est de bâtir la capacité du chien à rester seul, étape par étape, toujours en respectant son rythme.
Ces exercices sont préventifs et bénéfiques pour un chiot qui ne présente pas de difficultés préalables avec la séparation. Si votre chien a déjà du mal à rester seul, consultez un professionnel, car l’approche devra être personnalisée et plus systématique que celle décrite ici.
Évitez de faire paniquer votre chien la nuit en le laissant seul dans une pièce. Assurez-vous qu'il dorme avec vous et que vous soyez disponible pour le réconforter au besoin.
N'entraînez pas la cage et la solitude simultanément. Ce sont deux concepts très différents qui doivent être travaillés indépendamment. Entraîner les deux en même temps risque d’être trop demandant pour le chien, et si cela ne se passe pas comme prévu, vous aurez de la difficulté à savoir s’il s’agit de détresse de confinement ou d’un problème lié à la séparation.
Utilisez un grand enclos ou une pièce isolée avec une barrière pour bébé pour les exercices de séparation. Assurez-vous d'abord que votre chiot se sent à l'aise dans cet espace en votre présence pour vaquer à ses occupations régulières.
Idéalement, cet espace devrait être installé dans un endroit au cœur de la vie familiale pour ne pas que le chiot se sente isolé lorsqu’il s’y trouve.
Pratiquez ces exercices lorsque le chiot est déjà disposé à se reposer, après un effort physique, une période de jeu ou une marche, par exemple, et qu’il s’occupe à manger dans un jouet interactif (ex.: Kong, boule distributrice, tapis de léchage).
Assurez-vous que le lieu où vous laisserez votre protégé est exempt de tout danger.
Procurez-vous une caméra pour observer votre chiot lorsqu'il est hors de votre champ de vision. Ces caméras sont maintenant abordables et faciles à utiliser (ex: Wyze ou Yi). Évitez cependant de dépenser inutilement de l’argent pour des gadgets comme des caméras avec distributeurs de nourriture intégrés ou qui vous permettent de parler à votre chien. Ces fonctions seront peu utiles.
Si votre chiot est nerveux, faites jouer de la musique ou un bruit de fond pour masquer les sons extérieurs. Assurez-vous cependant que ces sons sont utilisés fréquemment dans la journée et non seulement lors de vos pratiques de départs.
Commencez par passer du temps dans la pièce du chien ou près de son enclos en restant calme et neutre pendant qu'il consomme de la nourriture.
Sans rien dire, levez-vous nonchalamment, et éloignez-vous de la zone du chien de quelques mètres, puis revenez. Assurez-vous de ne pas donner de nourriture ni d’accorder d’attention particulière à votre retour. Vos départs et vos retours devraient être des non-événements.
Si l’expérience se passe bien, quittez à nouveau quelques fois pendant le repas du chiot. Alternez entre des départs très courts et des départs un peu plus longs où vous serez hors de la vue de votre chiot. Optez d'abord pour être hors de sa vue pendant quelques secondes seulement et augmentez la durée très graduellement. Soyez attentif au langage corporel de votre chiot pour vous assurer de respecter son rythme.
Veillez à ne pas prolonger toujours les départs, car le but est de créer des succès et non d’augmenter continuellement la difficulté des exercices.
Avec le temps, si votre chien tolère bien ces absences, rallongez-les tout en alternant entre départs courts et plus longs. Surveillez votre chien à l’aide de la caméra que vous aurez préalablement installée. Continuez toujours à alterner entre des petites absences très courtes et des absences plus longues.
Continuez ainsi jusqu’à ce que vous puissiez être hors de la vue de votre chien pour plusieurs minutes et que votre chiot soit toujours calme et confiant malgré le fait qu’il ait terminé de consommer sa nourriture. Alternez toujours entre des départs courts et d’autres, plus longs.
Si ces exercices sont bien exécutés, votre chien ne devrait pas montrer d'inconfort. Si c’est le cas, revenez à des durées plus faciles ou consultez un professionnel qui s’y connaît en problèmes liés à la séparation.
Lorsque votre pitou sera en mesure de rester détendu entre 30 à 60 minutes dans sa zone de repos alors que vous allez et venez dans la maison, vous serez rendus à travailler les vrais départs où vous quitterez les lieux. Notez qu’il n’y a vraiment pas d’urgence à se rendre à cette étape, il serait normal, voire souhaitable, de prendre deux mois avant de compléter l'étape précédente.
Une fois le moment de quitter la maison venu, il sera encore plus important de surveiller votre animal par caméra vidéo tout au long des exercices. Continuez les exercices comme vous le faisiez précédemment, mais intégrez à l’occasion des sorties à l’extérieur. Quittez d’abord pour quelques secondes (peut-être 5 à 10 pour débuter) puis graduellement augmentez la durée. Comme à l’habitude, il sera important de revenir régulièrement à des durées plus courtes pour ne pas que les exercices ressemblent à une escalade des durées et que les séances soient toujours de plus en plus difficiles.
Il est fort possible que votre chiot soit légèrement inconfortable au cours de ces exercices. Il sera probablement impossible que votre chiot reste de marbre à vos départs. Si vous faites un travail très graduel et que malgré cela, quelques pleurs se font entendre, ne soyez pas démoli, ces gémissements sont peut-être inévitables.
Si votre animal retrouve son calme après un court épisode d’inconfort, vous pouvez continuer à procéder en restant vigilant. Si cependant ces pleurs s’intensifient ou ressemblent à de la panique, je vous recommande de cesser ces pratiques et de faire appel à un professionnel. Surtout, ne laissez pas votre chien paniquer sans lui venir en aide!
Peut-être que votre chien n’est pas encore à l’aise avec le fait de rester seul, mais vous avez vraiment besoin d’aller faire des commissions, et présentement, il dort… Résistez à la tentation de vous esquiver en douce. Si jamais votre chiot se réveille et réalise qu’il est seul, cette panique pourrait vraiment avoir un impact négatif sur sa confiance et pourrait être difficile à réparer.
Je suis très conscient que ce ne sont pas tous les propriétaires de chiots qui ont autant de contrôle sur leur horaire pour être en mesure d’offrir ce soutien à leur chiot, cependant, il est probablement possible de trouver des gens qui peuvent vous aider en gardant votre chiot pendant vos absences. Pensez à des voisins à la retraite, des amis en télétravail, de la famille sur un horaire de soir, etc. Il faut parfois être créatif, mais trouver quelqu’un pour surveiller une petite boule de poil aussi mignonne sera fort possiblement plus facile que vous ne le croyez.
Bien que cet apprentissage semble long et complexe, en agissant de la manière décrite dans cet article, vous mettez toutes les chances de votre côté afin d’éviter de créer des traumatismes qui pourraient déclencher des problèmes plus complexes, comme l’anxiété de séparation, qui sont généralement longs et ardus à régler. Comme on le dit souvent, mieux vaut prévenir que guérir.